Depuis plus de vingt-cinq ans, la zone frontalière entre le Rwanda et la République Démocratique du Congo est le théâtre de conflits et de tensions qui participent grandement à l’instabilité de la région des Grands Lacs. Après quelques années de relative accalmie, en particulier après l’élection du président congolais Félix Tshisekedi, en 2019, des tensions se font à nouveau ressentir. Elles font suite à la résurgence du Mouvement du 23 mars (M23) en novembre 2021, la République Démocratique du Congo accusant le Rwanda de soutenir ce groupe rebelle. La région du Nord Kivu cristallise depuis vingt ans les tensions entre les deux pays notamment parce que s’y concentrent 80% des réserves mondiales en coltan, un minerai utilisé dans la fabrication de nombreux objets électroniques. Dès lors, comment rendre compte de la permanence des tensions et des violences qui déchirent la région ? Comment expliquer l’incapacité des deux pays à normaliser leurs relations ?
En janvier dernier, l’armée rwandaise a tiré un missile sur un avion de chasse congolais Sukhoi-25 alors que celui-ci survolait Goma, la capitale de la province du Nord-Kivu en République démocratique du Congo (RDC). Cette ville d’un million d’habitants est située à la frontière avec le Rwanda. L’avion revenait d’une mission dans la région de Kitshanga, une ville stratégique située à 100 kilomètres à l’ouest de Goma. Cette ville est désormais le théâtre de batailles rangées entre l’armée congolaise et une coalition de groupes armés, d’une part, et le mouvement M23. L’avion a pu atterrir à l’aéroport de Goma et aucune victime n’a été déplorée. L’impression générale est que les deux pays, dont les relations se sont considérablement détériorées depuis que le M23 a repris ses opérations, sont désormais entrés dans une guerre ouverte. Le bras de fer entre Paul Kagame et Félix Tshisekedi, ainsi que l’arrivée de la coalition militaire internationale dans l’est de la RDC, évoquent l’histoire sombre de la relation entre les deux pays.